Errons à travers les Ruines nouvelles de Le Flegmatic !

Thomas Boudineau (c) Frank Alix

LE FLEGMATIC – RUINES NOUVELLES

(Sorti le 30-08-2019 chez We are unique ! Records / Mostla)

Ruines nouvelles est le cadet des trois albums de Le Flegmatic, après Esprit de conquête (2015) et Bouleversement majeur (2017). Comme ses aînés, il a des accents de road-movie et vous donnera l’irrésistible envie de démarrer votre 205 et de rouler sans but, vers le Grand (Sud-)Ouest ou les Grands Causses.

Maître dans l’art du contre-pied et de l’ironie froide, Thomas Boudineau, de son encre caustique, dépeint des saynètes du quotidien à contre-jour, à la manière de Depardon. Images habillées par le jeu délicat des guitares éthérées de son compagnon de route, Romain Nègre.

L’espace d’un instant ouvre l’album sur des accents blues. A la manière de Dream River de Bill Callahan, le décor de cordes amples appelle à la rêverie, trompe-l’œil d’un propos acide sur les relations humaines faussement bienveillantes. Aucun des Flegmatic ne cache son admiration pour le songwriting de Callahan, un goût commun pour les arpèges flâneurs, folkeux sans tomber dans l’Américana et une commune inclination à mettre à nu notre part obscure, notre petite hypocrisie quotidienne.

Toujours avec dérision, Le Flegmatic dévoile des scènes et des lieux aussi inattendus qu’absurdes.

Thomas Boudineau peut se vanter d’être le seul baladin à parler de sauce grand veneur dans ses compositions (Chez le boucher in Bouleversement majeur) mais il est surtout question d’amour derrière le sarcasme de ce gigot… et dans cette file d’attente trop longue.

Ainsi de Citadelles ne se fait-il pas «  casser la gueule devant Netto » ? Ces textes sont souvent émaillés de visions surréalistes « Je crois voir des pd dans les buissons mais ce sont des boulistes…mais ce ne sont pas les derniers » (En voiture, Bouleversement majeur).

D’ailleurs ne faut-il pas s’éloigner un peu pour bien voir l’infiniment petit ? Il aurait pu être géographe/urbaniste, dans sa manière d’approcher le rapport de l’Homme aux infrastructures : les routes, les autoroutes, les fossés, les rives, les ponts, les pancartes, les cartes, les barrages, l’Europe, les citadelles, ces zones commerciales, ruines nouvelles, ces villes aux mentalités fanées. Thématique urbaine, obsédante, que l’on retrouve dans C’est une ville « où tout le monde est moche », probable écho de son morceau Béziers (Esprit de conquête) .

L’harmonie douce de la voix de Céline Ribault dans les Camions vous rappellera The blue moods of Spain, suspendu, fragile et bluesy,. « Les Pyrénées sont des femmes fontaines qui me laissaient jouer sous leur jupe ». Les références à l’amour et au sexe (raté) affleurent dans chaque album (L’anniversaire in Esprit de conquête), ainsi des yogis qui « se caressent sur de la bossa nova ». Trop chaud, quant à lui, n’offre-t-il pas la démesure provocatrice de « tringler la serveuse du bar du Progrés, sur le comptoir » ? S’il fallait le préciser, sous les yeux indifférents, surtout indifférents des piliers de bar, tout ça parce qu’il fait trop chaud. Moment fort de l’album, temps du passage à l’acte, où deux témoins de Jéhovah font les frais de sa déraison, aveuglé tel Meursault dans l’Etranger. Puis le Radeau, magnifique morceau fleuve, oserai-je, de 10 minutes enfonce le clou de l’aveuglement « royaumes engloutis qui se croyaient éternels ». Seraient-ce ces ruines nouvelles, ces interminables paysages de déréliction aux abords de nos villes ?

https://souterraine.biz/album/ruines-nouvelles

Une fois encore dans Ruines Nouvelles, Thomas Boudineau par son chant timide ourlé de guitares laid back et de sa plume bitume (celle qui fait prendre la route) redonne la beauté à la laideur de nos existences, extrait la poésie de nos vices. « Mon amour pour toi prend son temps pour crever », « c’est horrible et c’est beau ».

Chant : Thomas Boudineau

Chœur : Marion Dinse, Céline Ribault

Guitares : Romain Nègre, Thomas Boudineau

Batterie : Benjamin Richard

Basse : Julian Babou

Mixage : Luis Mazzoni

Photo (c) Frank Alix

Fred / Rock this Tarn

Daniel Blumberg, le renouveau d’un innovateur de génie

C’est un alien, un de ces artistes qui arpentent le monde du son et de l’art en laissant de côté les sentiers battus, c’est pourquoi son nom est inconnu du grand public. Ne vous y trompez pas pour autant : Daniel Blumberg est loin d’être un novice…

Bien qu’il n’ait même pas trente ans, il a déjà de nombreuses années d’expérience derrière lui puisqu’il a d’abord évolué dans des formations telles que le célèbre Yuck, groupe au sein duquel il a œuvré jusqu’en 2013, avant de partir pour de nouvelles aventures – avec des musiciens rencontrés au Café Oto notamment.

Une période durant laquelle l’artiste disparaît quelque peu du devant de la scène et c’est cinq ans et une rupture amoureuse plus tard qu’on le retrouve avec Minus, son premier album solo sorti en mai 2018. Un opus qui nous avait marqué par sa qualité et son audace : que cela soit au niveau musical ou concernant les formats eux-même rien ne rentre dans les cadres habituels. On est loin de la classique alternance couplet/refrain, les sonorités sont souvent assez brutes et l’on ne trouve sur cet opus que sept titres…oui mais sept chansons dont les durées sont presque toutes supérieures à quatre minutes, sans parler de Madder, morceau-fleuve et lunaire de 12min33 (!).

C’est donc avec curiosité et plaisir que nous avons vu réapparaître Blumberg dans nos radars, un an et une tournée plus tard, avec son EP Liv, sorti en mars dernier. Inutile de vous dire que ce cinq titres nouvellement né vaut sérieusement le détour ! La voix y est plus sage qu’auparavant, plus travaillée aussi peut-être, mais on ne perd pas pour autant l’essence de la musique de l’artiste.

En effet, le londonien continue d’y composer des morceaux créés compulsivement et d’expérimenter (de manière presque provocatrice par moment) comme lors de sa prestation donnée à l’Eglise du Gésu le 23 mars dernier. Le public a alors eu la chance de le voir déambuler – accompagné de Billy Steiger au violon – dans tout le bâtiment, alternant les instruments, les intonations de voix et les déconstructions de morceaux. Plus qu’un simple concert, l’artiste nous y a offert, durant plus de deux heures, une véritable performance, à l’image de celles couramment répandues dans le monde de l’art contemporain.

Insaisissable, Daniel Blumberg est, sans nul doute, un de ces génies qui, à travers leurs créations, bousculent les lignes et nous forcent à remettre en cause notre regard sur la musique et sur l’art en général.

Un artiste à voir et à écouter sans modération !

https://instagram.com/_danielblumberg_

https://www.youtube.com/channel/UCqHB1phnJAte62LuKcRrQUw

Photo ©Steve Gullick

L’esprit poète de Lidwine de Royer Dupré

Après deux ans d’absence, Lidwine de Royer Dupré nous a accordé un entretien sur son EP Nocturne qui sortira le 20 juin et sa métamorphose musicale, sous le signe de la poésie, de la sorcellerie et de la nuit!

La chanteuse suivie depuis ses débuts par un public fidèle avait annoncé que son album ALIVE sorti en 2017, qui proposait des morceaux de ses précédents opus réarrangés, serait son dernier. Toujours aussi pointilleuse, Lidwine s’est attelée à la réalisation de Nocturne en solitaire, et s’est confiée sur la découverte d’un livre sur la Normandie, où elle s’est installée depuis plusieurs années, qui a bouleversé son processus de création. Pour cet opus, elle a abandonné la harpe au profit de sonorités électroniques, délivrant des chansons en français au concentré poétique. Comment Lidwine de Royer Dupré a-t-elle élaboré ce cheminement ?

Dans votre nouvel EP Nocturne, vous chantez pour la première fois en français. Pourquoi avez-vous fait ce choix ?
C’est la lecture du livre La Normandie romanesque et merveilleuse : traditions, légendes et superstitions populaires de cette province d’Amélie Bosquet qui m’a inspiré ces chansons. Ça n’avait pas de sens pour moi de faire l’album en anglais car le livre est écrit en français et fait référence aux légendes normandes. Il y avait une correspondance, une logique à écrire en français. Auparavant, je chantais en anglais pour raconter des histoires personnelles et ça n’est pas le cas de Nocturne.

Comment l’idée singulière vous est-elle venue de créer un album à partir de cet essai ?
J’ai été emportée par la lecture de ce livre et le reste s’est fait naturellement. Cet ouvrage aborde des légendes variées et j’ai fait une sélection en fonction de celles qui, personnellement, m’intéressaient. J’y ai beaucoup travaillé.

En écoutant « Chasse Proserpine » on perçoit votre intérêt pour la sorcellerie et le féminisme, pouvez-vous nous en parler ?
Il me tenait à cœur d’entretenir ce lien et de défendre cette cause. La force féminine est rattachée à la puissance de la terre, de la nature et c’est un élément qui transparaît dans l’œuvre d’Amélie Bosquet. Cette écrivaine est une contemporaine de Flaubert, une femme comme George Sand, et au long du livre elle rappelle que l’Église a exterminé les forces païennes et que la religion a restreint la liberté des femmes.

Dans Nocturne, ces références à la répression des femmes sont accentuées grâce à la dimension organique qu’il y a dans vos textes, tout particulièrement lorsque l’on écoute « Fée » dont le pouvoir d’évocation des mots est puissant.
C’est amusant que vous parliez de « Fée » parce que je me souviens très bien comment cette chanson est née : j’ai trouvé les paroles en marchant dans ce que l’on appelle les « chasses », qui sont des chemins en Normandie. J’ai conçu cette chanson comme une poésie car les paroles sont des vers pour moi et le texte s’est posé sur la musique à la manière d’un poème.

Y a-t-il un ordre précis pour écouter votre EP ?
Pour moi , il a un ordre car je l’ai composé en fil continu avec ce que l’on appelle du « field recording » : des enregistrements de bruits naturels. Je l’ai conçu comme une balade nocturne où l’on peut rencontrer différents personnages juste avant « Aube », titre du dernier morceau. Mais pour autant chacun est libre d’écouter les morceaux dans l’ordre qu’il désire, je ne veux pas dicter une écoute ! Ce qui est intéressant dans la musique et dans une œuvre en général, c’est la manière dont chacun se l’approprie.

Vous semblez focalisée sur la tombée du jour…
Je suis attachée au côté nocturne parce qu’il est incorporé aux animaux de mauvaise réputation, les chats errants, les hiboux, que l’on associe à la sorcellerie. Initialement, je voulais appeler mon album « Nocturnes » au pluriel pour englober cette multitude d’êtres, ces animaux qui vivent la nuit. Au-delà de ça, la nuit, nos pensées sont différentes, nous concevons le monde sous un autre angle, et c’est à ce moment-là que se déroule le sabbat des sorcières.

Justement, de sorcellerie, l’esthétique de « Chasse Proserpine » en est imprégnée, quelles ont été vos influences ?
C’est essentiellement la lecture qui a pu m’aiguiller. Dans la bibliothèque où je vais, il y a un fonds régional où j’ai pu me renseigner sur les procès de sorcellerie qui ont eu lieu au niveau local. J’avais annoncé que j’arrêtais la musique parce que je pensais n’avoir plus rien à dire mais en travaillant sur ce projet, je me dirigeais vers une voie inédite, alors j’ai réalisé le projet tout seule. Habituellement ça n’est pas moi qui m’occupe du mixage, je suis devenue plus autonome et j’ai marqué ce changement en ajoutant en extension à mon prénom Lidwine mon nom de famille. J’ai envie d’adopter la même approche pour travailler sur tous mes autres projets à venir et je me sens moins dépendante techniquement. Je pense que sera plus lo-fi, moins propre, mais c’est ce qui me convient de pouvoir créer en y prenant du plaisir.

Et la harpe dans tout ça ?
J’ai abandonné la harpe pour cet album, et j’ai tout réalisé avec mon ordinateur. La seule source acoustique provient des bruits naturels que l’on peut entendre. J’ai par exemple enregistré les sons de mes chats en train de se bagarrer. L’ambiance dont je suis la plus fière est celle du morceau « Esprit Tempête », que je vous conseille d’écouter au casque pour mieux entendre la pluie et l’orage. Le but était de donner une impression physique. Le travail effectué en solitaire pour cet enregistrement m’a permis d’évacuer le stress qu’il me procure habituellement.

Sur cet album, vous alliez un lyrisme intimiste à votre puissance vocale, avez-vous envisagé de faire des concerts ?
Je trouve l’exercice de la scène trop stressant donc je ne ferai pas de concerts. Transposer l’atmosphère de l’album sur les planches serait trop onéreux. C’est une libération car j’ai envie de me consacrer à la production. Tout ce qui me plaît, c’est de créer, composer et mixer en solitaire.

Pour annoncer le EP, vous avez publié des vidéos très courtes de paysages plongés dans la pénombre, avez-vous prévu de tourner d’autres clips ?
Les vidéos sur Facebook sont des teasers pour prévenir les gens qui écoutaient déjà ma musique que j’allais composer quelque chose de totalement différent. Je pense réaliser deux autres clips dans l’esprit de ceux qu’on peut déjà voir sur YouTube avec des images se mouvant un peu comme dans un tableau. Dans l’idéal, j’aimerais qu’il y ait une vidéo pour chaque chanson mais cela dépendra du temps dont je disposerai.

http://www.lidwine.com/

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Early Spring Horses, « Honey »

video honey

« Honey », le nouveau single d’Early Spring Horses, dévoile une pop aux pulsations soniques qui raconte l’histoire d’un homme confiné, oscillant entre espoir et désolation.

Deux ans après What The Wood Whispers To Itself, le chanteur-pianiste Vincent Stockholm et le harpiste Arthur Wilmotte se sont rendus à Berlin pour enregistrer leur deuxième album Narcosia (à paraître chez Victorialand Records, leur label indépendant), sous la houlette du producteur Enrico Tiberi.

Initialement, « Honey » devait être un morceau intimiste où la voix de Vincent serait accompagnée de quelques notes de harpe et de piano, mais l’atmosphère émanant du studio The Famous Gold Watch a poussé les musiciens à modifier les arrangements avec plus de basses. En effet, le local est abrité dans des sous-sols aux fenêtres murées d’anciens bâtiments de la Stasi, et la sensation de confinement qui y règne est étrangement liée aux paroles de « Honey », écrites par Vincent bien avant qu’il ne se rende en Allemagne…

Arthur Wilmotte

Inspiré par les livres de Claire Keagan, il cisèle ses chansons avec des textes où aucun mot n’est laissé au hasard. Tous ses morceaux racontent une histoire précise qu’il « déréfèrence » au fur et à mesure du processus d’écriture afin que le résultat final laisse libre cours à l’interprétation de chacun. « Honey » s’empare de la souffrance engendrée par l’enfermement avec des paroles poétiques emplies de désolation, illustrées dans le clip avec subtilité. Des formes graphiques, déstructurées – rappelant l’architecture land art de Michael Heizer avec Complex City – se rivent sur des danseurs se mouvant de manière viscérale, repoussés par des murs invisibles. Deux d’entre eux s’enlacent avant de s’évanouir dans le déclin annoncé par Vincent en une « constellation de faux espoirs ». La pulsation des basses atteint son climax à la fin de « Honey » avec un sonar qui nous fait deviner le bruit des pâles d’un bateau, peut être pour symboliser la piscine, la mer où s’enclave un être en détresse, inexorablement voué à la solitude. La pop sonique de « Honey » crée la symbiose entre nos peurs et les profondeurs sous-marines dont s’est inspiré Early Spring Horses pour composer Narcosia.

https://www.earlyspringhorses.com/

Rites et Sacrifices III à La Sainte Dynamo

Pour cette troisième édition, Rites et Sacrifices a invité Lisieux, La Mandorle, Machine est mon cœur et Orbel à La Sainte Dynamo lors d’un concert dédié aux croisements entre passé et présent dans les musiques sombres.

Lisieux

En réunissant des groupes éthérés inspirés par l’underground gothique des années 80, l’association toulousaine proposait de « faire le pont entre musiques anciennes et sonorités actuelles », mais la porosité entre les deux est-elle réelle ? Le samedi 1er juin, j’ai pu assister au concert à La Sainte Dynamo, afin de voir ce qu’il en était.

La Mandorle

Chaque formation se nourrit du passé et le distille par touches dans ses compositions. La chorale médiévale La Mandorle sort de l’ombre des chants ecclésiastiques tels que les kyries grégoriens en les reprenant a capella. Le trio toulousain Lisieux est lui aussi plongé dans un imaginaire liturgique au travers de paroles abordant l’oppression religieuse, le déisme. Sa néofolk aux allures de messe noire puise ses racines chez Death In June et sera signée chez le label organisant leurs concerts français : Steelwork Maschine. La dark-wave de Machine est mon cœur emprunte aux débuts de la musique électronique en réalisant des collages de bandes magnétiques, et a recours à des synthétiseurs analogiques dont la densité brumeuse confère à l’ambient. Si les influences de nos musiciens sont légion, édifient-elles pour autant une passerelle vers l’époque actuelle ?

Machine est mon cœur

Passionné de science-fiction, Machine est mon cœur dépeint dans « I Had a Dream » un monde désertique où l’homme serait débarrassé des affres de l’hyperconsommation. Le duo a conçu Dystopium – album né d’une fusion entre dystopie et opium – pour des rêveurs pressés de s’échapper de la réalité. Les voix shoegaze des chanteuses d’Orbel se fondent dans des arrangements post-rock, cinématographiques et inquiétants, répondant au nom de « doom pop ». Enfin, l’originalité de La Mandorle est d’ouvrir le monde actuel sur des musiques réduites à l’oubli, en leur redonnant vie dans un bar contrastant avec leur religiosité originelle, et entraîne le public dans une communion dépaysante.

Beyond There, premier EP d’Orbel

L’impression qui résulte de cette nuit est que la jonction des sonorités a bien fonctionné, grâce au pouvoir introspectif de cette musique mélancolique. Loin de se circonscrire dans une période datée, elle relève de l’intemporel. Est-ce la naissance d’un nouveau genre ?

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Les pérégrinations sylvestres de Gofannon

Craft, le nouvel album de Gofannon, tisse des narrations sonores où la nature se fait démiurge, magnifiée par une folk bucolique sur laquelle l’ombre du metal scandinave plane.

L’apprenti forgeron Samuel Méric a passé son enfance dans le petit village d’Auribail en Haute-Garonne, où il s’est imprégné d’une campagne sauvage qui lui a permis de créer un univers musical différent. Fasciné par Tolkien, il chante en français, anglais, suédois et en occitan dans lequel il puise des chants traditionnels. En 2016, il créé en solo Gofannon, un projet de folk pagan et sort son premier EP Prosodie. Les musiciens Rodolphe Johansson au violoncelle, Edouard Golfier aux percussions et Sarg Mercadier à la guitare (également chanteur d’Eydolon, formation réarrangeant des textes occitans avec des sonorités electro sombres) le rejoignent en 2018 pour enregistrer Craft qui sort le 24 mai chez Active Records au format numérique. Une version physique est prévue pour juillet chez Non Posse Mori Records, label français créé cette année et dédié au black metal, au neo folk ou encore à la musique médiévale.

Dans la mythologie celtique, Gofannon est le dieu des forgerons et les musiciens, passionnés d’histoire, colorent leurs textes de références traversant les âges afin de délivrer « une vision d’aujourd’hui des temps anciens et oubliés ». Les toulousains donnent un second souffle au folklore occitan en reprenant sur l’album deux chants traditionnels qui font honneur à la musicalité du patois. La chanson « Las fialairas / Herr mannelig » date du seizième siècle et raconte l’histoire de trois sœurs fileuses qui s’appliquent à la tâche toute la journée et est considérée comme un chant de travail entonné par les hommes pour se donner du courage lors des veillées.

Les compositions originales de Craft invitent l’auditeur à sillonner des plaines et des montagnes en l’immergeant dans ses narrations sonores aux multiples dédales. C’est un véritable pèlerinage que suggèrent les morceaux  » Escornboeuf » ou « Alaric », que la vielle à roue, le bol tibétain ou la guimbarde imprègnent d’une atmosphère sylvestre, transposée visuellement dans le clip « L’animal » dévoilé le 22 mai.

Le givre sonique de Candélabre

Si vous ne connaissez pas Candélabre, il est temps de découvrir ce trio qui fait honneur aux années glorieuses de la coldwave et du shoegaze.

Originaires de Toulouse, Cindy Sanchez au chant, Anthony Herigny à la guitare et Michaël De Almeida à la basse et au clavier se sont formés en 2017 à la suite d’un concert où leurs groupes respectifs jouaient ensemble (dont Lisieux, leur formation néo-folk). Si leur passion pour la musique des années 80 et 90 les a fédérés, ils reconnaissent que c’est grâce à leurs goûts divergents – en passant de la musique électronique au metal – qu’ils acquièrent une complémentarité et qu’ils créent l’univers singulier, à la fois sombre et cristallin, de Candélabre.

En février 2018, leur premier EP sobrement intitulé S/T sort et inaugure par la même occasion le label toulousain indépendant Solange Endormie Records (dédié aux genres cold-wave, post-punk et minimal) en étant leur premier groupe signé. BLWBCK. Life Is A Walkman, une autre maison de disque issue de la ville rose spécialisée dans le drone, l’ambient, et n’importe quelle musique capable de « procurer simultanément plaisir et tristesse » a également pris Candélabre sous son aile. Le groupe s’est produit dans de nombreux lieux phares de la musique indé de la ville tels que Le Dada, Le Rex ou encore L’usine à musique.

Candélabre se définit sur son site internet comme édifiant « de petites chapelles soniques dans lesquelles langueur et tension sont la clef de voûte », et lorsque l’on écoute les cinq titres de S/T, force est de constater que l’univers musical du trio confère à une religiosité sonore que Cocteau Twins n’aurait pas reniée. Le timbre aérien et puissant de Cindy comblera les adorateurs de Cranes ou Lush, et la basse brumeuse est nappée d’une contagieuse mélancolie digne de The Chameleons. La mélodie lancinante de « Carrion Season » subjugue l’album de son énergie spectrale, comme héritée des cieux.

Candélabre prépare un album qui devrait sortir cette année et sera en concert à la Cave à Rock le 18 juin aux côtés de Parking Dance et de Superficial Single Boy.

https://candelabre.bigcartel.com/

Lidwine de Royer Dupré « Chasse Proserpine »

Alors qu’elle avait annoncé qu’elle arrêtait la musique et qu’elle ne sortirait plus d’album, Lidwine de Royer Dupré revient avec un clip inattendu où sorcellerie et féminisme s’intriquent !

Quelle n’est pas notre surprise de découvrir un nouveau morceau de la chanteuse, alors qu’elle avait déclaré officiellement dans un communiqué que son album Alive, paru en 2017, serait le dernier! En effet, la multi-instrumentiste autodidacte prépare un EP qui sortira le 20 juin prochain intitulé Nocturne, où elle chante pour la première fois en français. Avec son titre inédit « Chasse Proserpine », le paysage sonore de Lidwine de Royer Dupré prend un tournant plus dark, où la folk céleste est laissée de côté au profit d’arrangements électro pesants.

La vidéo de « Chasse Proserpine » dévoile un monde mystique qui lui a été insufflé par la lecture de l’essai La Normandie romanesque et merveilleuse : traditions, légendes et superstitions populaires de cette province écrit par Amélie Bosquet. Les images en négatif peuplées d’ombres chimériques plongent le film dans l’abstraction, où défile une femme décoiffée, vêtue d’un long drapé blanc, se livrant à une danse rituelle qui possède toutes les caractéristiques d’un sabbat de sorcières. L’esthétique occulte de la vidéo transportera votre imaginaire dans les contrées chères au dessinateur et sculpteur Bill Crisafi, se nourrissant du folklore de la ville de Salem.

Plant Magic par le dessinateur Bill Crisafi.

En effet, lorsque la voix envoûtante de Lidwine nous assène de son phrasé lancinant – bien que se référant probablement à Proserpine, la déesse des saisons et de la chasse – c’est pour symboliser l’oppression dont ont été victimes les femmes pendant l’Inquisition et délivrer un message profondément féministe. Ainsi les paroles, toujours d’actualité, résonnent comme un hymne : « jamais la paix ne revient », « je suis la rugissante de vos nuits ». Lidwine nous transporte dans un monde habité de créatures légendaires et nocturnes prêtes à se fondre dans la réalité, qui raviront les fans de Chelsea Wolfe.

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http://www.lidwine.com/

https://www.youtube.com/user/LidwineMusicChannel

Haleiwa, stratosphère lo-fi

La bande-son du printemps : on écoute le nouveau single d’Haleiwa « HKI-97 » pour se prélasser au soleil.

Derrière Haleiwa se cache Mikko Singh, un musicien suédois qui mène à bien son projet musical en solo. Pendant près de deux ans, il s’est enfermé dans son studio à Stockholm pour enregistrer son troisième album Cloud Formations à paraître en juillet, et produit par le label berlinois Morr Music. Si au début de sa carrière, le multi-instrumentiste est attaché au skate punk et à la musique hardcore, cet opus donne lieu à un nouveau départ car son œuvre s’est laissée bercer par la musique indie, l’influence du krautrock ou encore de la new wave.

En 2015, Mikko Singh se passionne pour les synthétiseurs analogiques et les utilise pour réaliser son album Palm Trees of the Subarctic. C’est à partir de cette expérience qu’il accorde un rôle plus important à la basse dans ses compositions. Haleiwa se réinvente musicalement et c’est lors de ce processus qu’il donnera naissance aux premiers titres de Cloud Formations, sculptés jusqu’à ce que chaque grain, chaque note atteigne le degré de perfection qu’il s’était imposé. Pendant la conception du disque, il accorde plus d’attention que jamais aux subtilités du son et à ses effets sur les émotions grâce à une technique consistant à enregistrer plusieurs instruments avec des microphones de mauvaise qualité lo-fi. La stratification des instruments, brumeux et saturés, offre un rendu qui n’en est que plus intimiste, tout particulièrement sur « Cloud Formations » et « Foggy ».

Munissez-vous d’un casque et plongez dans l’écoute des neuf pistes de Cloud Formations qui vous abreuvera de sa pop stratosphérique menée de main de maître par des synthés lascifs et des riffs solaires.

HKI -97 by Haleiwa

Le kaléidoscope de BBC 6 Radio Music

Aujourd’hui, Les Musicophages vous emmènent à la découverte de la BBC 6 Radio Music, une antenne de la BBC valorisant les groupes signés par des labels indépendants, tous genres confondus.

La station de radio lancée en 2002 par la BBC est accessible sur les médias numériques et représente une mine pour tous les amoureux de musique alternative. L’atout de BBC 6 Radio Music, c’est qu’elle ne se circonscrit pas dans un style particulier, mais étend au contraire le champ des possibles à tous les courants musicaux : rock classique et indie, punk, jazz, funk, hip-hop, electro ou encore trip-hop. Ses programmations diffèrent de celles qui sont diffusées sur BBC Radio 1 et BBC Radio 2 et embrassent la période des années 60 à nos jours. Ce panorama combine des enregistrements anciens issus des archives de la BBC aux sorties du moment, dès lors que les groupes s’émancipent de la spirale mainstream qui englobe la majorité des radios, et leur préfère des labels indépendants tels que 4AD ou Bella Union.

L’autre particularité de la BBC 6 Radio Music, c’est de proposer des émissions thématiques avec un angle original pour satisfaire les passionnés. En ce moment, c’est la santé mentale qui est à l’honneur à la radio avec un cycle intitulé « Music to calm the mind ». La station a demandé à quelques-uns de ses artistes fétiches tels que John Grant ou Jungle quelle musique a le pouvoir d’apaiser nos esprits. Des réponses très variées fusent et recommandent Chopin ou Brian Eno. Et vous, quels sont les artistes qui calment votre anxiété ?

D’autre part, les animateurs de BBC 6 sont considérés comme des experts dans leur domaine musical de prédilection et c’est pourquoi vous pouvez écouter une émission hebdomadaire animée par Iggy Pop intitulée « Iggy Confidential » qui fait la part belle aux trésors cachés du rock. La radio est active sur les réseaux sociaux, en particulier sur Facebook et YouTube où elle diffuse des entretiens en vidéo et des live. Délectez-vous des derniers morceaux grâce à la playlist qui, cette semaine, vous fait découvrir les albums de The National, Foals ou encore Courtney Barnett.