Haleiwa, stratosphère lo-fi

La bande-son du printemps : on écoute le nouveau single d’Haleiwa « HKI-97 » pour se prélasser au soleil.

Derrière Haleiwa se cache Mikko Singh, un musicien suédois qui mène à bien son projet musical en solo. Pendant près de deux ans, il s’est enfermé dans son studio à Stockholm pour enregistrer son troisième album Cloud Formations à paraître en juillet, et produit par le label berlinois Morr Music. Si au début de sa carrière, le multi-instrumentiste est attaché au skate punk et à la musique hardcore, cet opus donne lieu à un nouveau départ car son œuvre s’est laissée bercer par la musique indie, l’influence du krautrock ou encore de la new wave.

En 2015, Mikko Singh se passionne pour les synthétiseurs analogiques et les utilise pour réaliser son album Palm Trees of the Subarctic. C’est à partir de cette expérience qu’il accorde un rôle plus important à la basse dans ses compositions. Haleiwa se réinvente musicalement et c’est lors de ce processus qu’il donnera naissance aux premiers titres de Cloud Formations, sculptés jusqu’à ce que chaque grain, chaque note atteigne le degré de perfection qu’il s’était imposé. Pendant la conception du disque, il accorde plus d’attention que jamais aux subtilités du son et à ses effets sur les émotions grâce à une technique consistant à enregistrer plusieurs instruments avec des microphones de mauvaise qualité lo-fi. La stratification des instruments, brumeux et saturés, offre un rendu qui n’en est que plus intimiste, tout particulièrement sur « Cloud Formations » et « Foggy ».

Munissez-vous d’un casque et plongez dans l’écoute des neuf pistes de Cloud Formations qui vous abreuvera de sa pop stratosphérique menée de main de maître par des synthés lascifs et des riffs solaires.

HKI -97 by Haleiwa

L’Eurovision engagée d’Hatari

Qui est Hatari, le groupe iconoclaste qui a déjoué les règles de l’Eurovision en manifestant son soutien au peuple palestinien ? En utilisant le télé-crochet pour dénoncer la guerre qui sévit dans le pays, le trio prouve que la musique pop peut avoir un impact sur la politique.

La finale de l’Eurovision s’est déroulée à Tel-Aviv, en Israël, alors que les affrontations avec la Palestine plongent le territoire dans le chaos. Si certains habitants se sont félicités d’être les hôtes d’un concours célébrant la paix dans le monde, de nombreux palestiniens se sont insurgés contre cet accueil deux mois après de venimeux conflits à Gaza, en appelant à boycotter le télé-crochet placé sous haute surveillance. Si l’ensemble de l’événement s’est déroulé dans le calme et dévoilait une programmation musicale peu diversifiée, Hatari est sorti du lot en proposant un style de musique différent et en réagissant à la cause palestinienne.

Au cours du soixante-quatrième concours de l’émission, le trio s’est démarqué des autres candidats en dérogeant au règlement qui exige que le contenu des chansons soit apolitique. Si l’Islande n’a jamais remporté le télé-crochet, les musiciens originaires de Reykjavik ont décroché la dixième place de la célèbre audition – devant la France qui figure en quatorzième place – en interprétant un morceau dans leur langue originale, alors que beaucoup de participants prennent le parti de chanter en anglais. Créée en 2015, la formation se définit ouvertement comme « anticapitaliste » et a sorti un EP en 2017. Début 2019, c’est avec le nouveau morceau «Hatrið mun sigra» (« La haine vaincra ») que la bande se présente à l’Eurovision et est élue par le public islandais à 54,36 % des suffrages. Si elle était d’abord rétive à participer au concours, elle considère la visibilité qui lui est accordée comme un moyen d’expression pour dénoncer l’oppression dans le pays accueillant la cérémonie en 2019.

Au premier abord, les téléspectateurs peuvent se laisser surprendre par l’esthétique BDSM arborée par Hatari et la singularité de leur musique « electronicore », un genre peu connu du grand public hérité des scènes EBM, industrielles et gothiques, auxquelles le trio emprunte aussi bien les codes fétichistes que les sonorités. C’est le message politique de la chanson qui permet aux candidats de sortir de l’ombre. En effet, leur chanson diffuse un message de mise en garde contre la haine s’accroissant en Europe et désire faire prendre conscience au public du danger que la violence fait naître, grâce à sa participation au télé-crochet à une heure de grande écoute. Sensibles au conflit israélo-palestinien, ils brandissent une banderole pro-palestine à la fin de l’audience que la sécurité s’empresse de confisquer, alors qu’ils avaient érigé un peu plus tôt dans la soirée le drapeau LGBTQI. Les gestes politiques sont proscrits du concours et les huées de l’auditoire peu convaincu par ce parti pris ne tardent pas à se faire entendre.

La dénonciation d’Hatari est corroborée par la performance de Madonna, qui défendait le titre « Future », un inédit de son opus à paraître Madame X le 14 juin prochain, en présentant deux danseurs main dans la main dont les blousons affichaient les drapeaux des deux pays. Lorsqu’elle entame « Like A Prayer », la chanteuse internationale effectue un parallèle détourné entre la Shoah et le conflit israélo-palestinien. Elle reçoit un accueil incendiaire de la part de l’ UER (Union européenne de radio télévision) pour avoir intégré des éléments politiques omis des répétitions à sa prestation. L’ampleur politique de cet événement est sans précédent dans l’historique de l’Eurovision.

Le thème de l’émission de 2019 était « Dare To Dream », et si les Islandais pointent du doigt l’effondrement d’un rêve qui ne semble pas accessible, force est de constater qu’ils remportent haut la main la palme de ceux qui osent, afin qu’un jour peut-être, leur rêve éclose grâce à une musique engagée.

https://hatari.is/

L.A. Zine Festival

Le festival de fanzines de Los Angeles se déroulera le dimanche 26 mai dans l’entrepôt de l’ancienne boulangerie industrielle Helms Bakery, à Culver City. Vous êtes passionnés par l’underground et ne jurez que par le Do It Yourself, foncez !

Le stand de Joyces Lee.

Cet événement dédié aux sous-cultures se déroule chaque année depuis 2012, et propose à ses visiteurs d’assister à des workshops pour apprendre à réaliser ses propres fanzines et échanger des astuces autour de cet artisanat qui fait fureur chez les plus créatifs. Des structures emblématiques pour les aficionados telles que le Craft And Folk Art Museum, le Rock’N’Roll Camp For Girls ou la librairie Meldown Comics se sont mobilisés pour l’occasion et ont participé à l’organisation d’ateliers, tout en proposant des points de rencontres pour ceux qui seraient désireux de sillonner la ville. La cité des anges a toujours été un vivier pour la sphère alternative et de nombreux exposants lui feront honneur. Vous pourrez y retrouver quantités de créateurs émergents comme Joyces Lee qui conçoit des fanzines sur la fusion entre le corps et la technologie ou Ajuan Mance, une professeure et artiste qui donne une visibilité dans Nuthingood aux communautés sous-représentées dans les médias mainstream. Chaque jour, sur leur facebook, ils publient un portrait étonnant de créateurs de fanzines.

Un exemplaire du fanzine Nuthingood.

https://www.facebook.com/lazinefest/

https://lazinefest.com/

https://joyceslee.com/

https://www.instagram.com/nuthingoodat4/

Björk caméléon

Alors que la chanteuse sort ces jours-ci un clip inédit, Les Musicophages ont fait l’acquisition d’un tout nouveau fanzine sur la garbe-robe de l’islandaise.

Si vous vous attendiez à découvrir des infos croustillantes sur son actualité musicale, passez votre chemin ! Les artistes espagnols Claudio Jiménez et Alions Cuenca ont créé une collection de fanzines dédiés aux figures iconiques de la musique pop en rendant hommage à leurs costumes scéniques. Le troisième numéro de Recor(d)tables vous offre la liberté de découper et de coller sur des patrons les tenues et les perruques les plus extravagantes de Björk. Si le concept vous enchante, vous avez également la possibilité d’habiller David Bowie ou Mickaël Jackson.

http://www.recordtables.com/

Grand Veymont atteint des sommets

Objet disque (Perio, Mocke, etc.) nous gratte-hifi  une fois de plus d’un EP qui porte bien son nom : Route du vertige.  Sorti le 18 février dernier, ces 4 titres aériens nous sont insufflés par un duo d’explorateurs de splendeurs : Béatrice et Jossselin aka Grand Veymont.

L’ascension de Grand Veymont, le plus haut sommet du Vercors (sic) ne dure que 45 minutes (le disque) mais cela suffit pour vite rentrer dans une transe synthétique. L’écoute s’apparente à une randonnée à travers les grands espaces pop , un saut avec ou sans élastique dans le Vert-Kraut, prendre de la hauteur enfin, sur des cimes analogiques. Au sommet, je déchausse le casque et continu d’être pris d’une extase cotonneuse jusque tard.

L’indiscutable héritage de Broadcast et de Stereolab est omniprésent pour les vétérans mais la référence passée, Route du Vertige  se trouve être unique et d’une très grande élégance. Entre le chant et la narration en français, Béatrice nous livre ses psaumes de façon habitée ce qui installe tout du long une atmosphère onirique, propice à la contemplation.

Grand Veymont

Les claviers vintages maîtrisés et une belle production confère à ce disque somptueux une aura qui saura dépasser je l’espère l’entre soi des diggers.

François LLORENS

Acetone au panthéon du slowcore

Le 22 septembre dernier Light in the attic a eu l’excellente idée de sortir une compilation  de titres tirés des 4 LP sortis entre 1992 et 2001 de Acetone.

Écouter: bandcamp, Deezer.

L’occasion de découvrir ou de redécouvrir un groupe cultissime et coolissime. Ce trio de Los Angeles a tourné avec The Verve, Mazzy Star ou Spiritualized mais malheureusement leur leader Ritchie Lee a mis fin à ses jours en 2001.

Souvent comparé au Velvet Underground, Acetone mériterait aussi d’apparaitre au côté de Low, Codéïne et Red House Painters dans les topitos du genre musical Slowcore.    François LLORENS