Live Report : This Is Not A Love Song! Festival, Jour 2

Cette histoire est une aventure en trois temps. Pour lire le compte rendu du premier jour, rendez vous ici

Jour 2 : Quand on se rend compte qu’on aime pas la musique

Retour sur le lieu de cette cinquième édition du This Is Not A Love Song. En prenant en compte de notre expérience de la veille, nous arrivons plus tôt afin de profiter un peu du village du festival. Bon, notre « plus tôt » s’apparente en fait à 20h15 et nous avons déjà loupé une bonne dizaine de concerts. Je reconnais The Killing Moon de Echo & The Bunnymen qui joue au loin sur la scène Flamingo. A peine arrivé et ma liste de concerts à voir est déjà diminuée. Je décide de faire sauter la fin du set des anglais (qui se limite à deux morceaux) et me dirige vers la scène Mosquito afin d’assister au concert de Requin Chagrin. Je refuse un fajita guacamole que me tend un ami et je vais me placer directement face à la scène dans l’espoir de pouvoir enfin profiter d’un concert dans de bonnes conditions.

Le groupe monte sur scène nonchalamment et se présente brièvement. Si le chant est en français, l’instrumentation est clairement référencée « groupes indies américains ». Un Real Estate à la sauce Yéyé ? Efficace et rafraîchissant, les guitares du quatuor, légèrement coldwave/post-punk sonnent très pop acidulée et sous ces 38° degrés ressentis, ce n’est pas pour me déplaire. En milieu de set, le groupe lâche deux gros requins gonflables dans le public, ce qui aura pour résultat plusieurs slams sur dos de squales assez rigolos et des moments plus gênants où la chanteuse devra gérer des attaques volantes de poisson carnassier en provenance d’un public toujours éméché de la veille. Ne pouvant pas dire si le groupe est agacé par l’attitude du public ou juste naturellement mal à l’aise sur scène, je me lasse peu à peu, surtout que, ingénierie de festival oblige, la voix est inaudible dans le mix des instruments. Le concert me laisse tout de même un bon ressenti et après un jour et demi, je me sens enfin en situation de festival. Je profite de ma bonne humeur passagère pour aller tenter le coup du côté de Jake Bugg qui débute sur la scène Flamingo. Trois minutes vingt de chant braillard sur fond de folk rock FM me mettent la tête au carré et me forcent à me diriger vers la buvette la plus proche pour une nouvelle bière. Du fond de mon verre, je subis cette pop cheesy qui représentera, après coup, le pic de mauvais goût de cette édition du festival.

Grandaddy étant absent pour cause de mortalité (on leur pardonne), je reprends une vadrouille avant d’aller me poser devant Hidden Charms sur la scène Mosquito. Une foule de curieux profite de l’annulation de la tête d’affiche américaine pour venir découvrir le garage rock 70’s des Londoniens. Si leur style n’est pas ma tasse de thé, l’association de la nuit tombée, l’attitude débonnaire mais fédératrice du groupe et l’attroupement inattendu font de ce concert une bonne surprise. Le seul hic qui m’évite de prendre mon pied sur Hidden Charms, c’est que je n’aime pas leur musique (et à ce moment du festival, je me questionne si je ne détesterais pas simplement la musique). Avec une redite sans réelle originalité et une standardisation à outrance, je peine à trouver quelque chose qui maintienne mon attention ici. A croire que le fait d’être jeune anglais un peu fringué suffise pour monter sur scène. Je deviens un peu aigri et je sors définitivement du set.

Le concert se termine tout de même avec la sensation de ne pas avoir passé un trop mauvais moment. Petite pause avant le début de Primal Scream, ce qui suggère un retour à la buvette. Une fois rééquipé, je reviens à la scène Flamingo pour découvrir les Écossais déjà en action. Étant naturellement inculte, je n’ai jamais écouté Primal Scream, mais supposant que le festival a dû débourser un petit pécule pour avoir le groupe, je lui laisse sa chance. Je m’installe dans un angle, entre un arbre et une poubelle et j’écoute. Après trois morceaux de rock 90’s, légèrement glam et légèrement indus, une évidence apparaît : et si, à défaut de ne pas aimer toute la musique du monde, je n’aimais pas juste le rock ? Fort de cette découverte – et de l’ennui que me procure le groupe – je me déplace vers l’enceinte du Paloma afin de découvrir les autres scènes. J’apprendrai plus tard que je suis parti du mauvais côté et que je loupe Show Me The Body, l’un des moments forts de ce festival, dixit mes proches.

Bror Gunnar Jansson se produit dans la Grande Salle. Avec son look de hobo, ce one-man band criard, à l’esthétique garage-blues vintage, me conforte dans ma prise de conscience. Au garage et au rock, je peux maintenant ajouter le blues à la musique que je n’aime pas. Toujours plus désabusé, à la recherche de la perle rare détachée de toute nostalgie passéiste, je continue ma course dans le Patio. Johnny Mafia commence son set et je comprends bien que ce n’est pas là que je trouverais ma came. Je m’enfuie et fini ma descente inexorable dans l’enfer de l’ennui pour atterrir dans la Love Room. L’ambiance boîte de nuit de campagne perdure (voir jour 1) mais je suis tout de même heureux d’y retrouver mes amis, plutôt éméchés, ayant aussi désertés le concert de Primal Scream. Après plusieurs dizaines de minutes passées à se dandiner sur un djset dispensable, on décide d’un commun accord de se diriger vers la scène Flamingo pour aller assister à la grande claque (salvatrice) de cette soirée.

Placé en plein centre d’un public rassemblé en une masse informe, constituée à 80 % de sueur, j’attends l’arrivée de Thee Oh Sees. Double batterie installées côte à côte, gros cab de basse d’un côté et gros cab de guitare de l’autre, définissent la scénographie sommaire du groupe qui annonce un concert efficace et direct. Et c’est le cas. N’ayant jamais eu la patience ou l’envie de m’investir dans les 18 albums du groupe ne comptez pas sur moi pour avancer une set-list approximative. Mais mes amis fins connaisseurs avaient l’air ravis. Monolithique, le son du groupe s’impose et soulève le public, parti en pogo violent. Les morceaux s’enchaînent et se ressemblent (un peu), mais la tension ne redescend pas. Le groupe dégage une maîtrise et un plaisir d’être sur scène qu’il partage avec la foule en transe. Si bien que l’on assiste au premier grand moment de catharsis généralisée de cette édition du This Is Not A Love Song. Restant une personne aigrie, je commence à m’irriter au cinquième coup de coude que je reçois dans la figure et me retire en fond de public pour voir le reste du concert dantesque dans la paix.

Ce deuxième jour de festival se termine donc dans l’allégresse après plusieurs difficultés rencontrées. Mais plus encore que la qualité des concerts ou des genres représentés, c’est la réalité de la vie en festival qui me laisse perplexe. Ayant tout de même conscience que le TINALS est un excellent festival à la programmation pertinente et exigeante, je comprends bien que le souci vient sûrement de moi et que je n’ai pas encore eu le déclic qui m’aurait permis de m’investir dans cette cinquième édition. Est-ce que le troisième jour saura m’apporter une réponse positive ?

Vu : Echo & The Bunnymen, Requin Chagrin, Hidden Charms, Thee Oh Sees

Subit :Jake Bugg, Primal Scream

Loupé : The Grys Grys, Grandaddy, Show Me The Body, et les autres.

Claque : Thee Oh Sees

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